La lumière, créatrice de vie

La lumière, créatrice de vie

La lumière est l’un des éléments majeurs dans toute composition visuelle. C’est elle qui permet qu’on y voie quelque chose, qui participe à créer une ambiance et révèle la perspective d’un espace. Elle va également ancrer l’action dans un environnement.

Pour composer un rendu qui corresponde à l’idée initiale, il faut connaître des règles de construction, mais aussi avoir en tête les différentes propriétés de la lumière :

La lumière définit le réel

La lumière contribue à ancrer les éléments dans le réel en leur conférant des propriétés physiques. Si l’action d’animer va apporter l’illusion de poids aux éléments, l’éclairage va en définir leurs dimensions et simuler une réalité.

Même en prise de vue réelle, la vidéo est un medium plat, en 2 dimensions. Ajouter de la lumière permet de comprendre les objets perçus : leur profondeur, leurs matières, etc. Finalement, elle recompose un semblant de réel !

Elle guide le regard du spectateur

Comme en peinture avec Le Caravage ou Georges de la Tour, la lumière sera utilisée pour orienter le regard du spectateur sur un objet, une action précise.

Au théâtre, les spots de lumière vont éclairer l’action importante et, ainsi, diriger l’œil du spectateur. Cette orientation, en vidéo, est présente dès le cadrage : cela permet plus de liberté artistique, en complément du rôle de guide qu’a la lumière pour le regard du spectateur.

La lumière définit l’ambiance

On a tous cette image d’un groupe d’enfants la nuit, qui se racontent des histoires effrayantes avec une lampe torche en dessous de leur visage. La lumière joue ici un rôle important dans l’ambiance : éclairé d’un angle inhabituel, le visage est modifié par la lumière vive, qui crée des ombres pour le rendre menaçant. Quand on éclaire pour la vidéo, c’est le même principe.

En prise de vue réelle comme en animation, la lumière aide à apporter une ambiance particulière à la scène. Durant un film d’action ou un film tout-public ; par exemple, l’ambiance ressentie n’est pas la même. Une pièce éclairée de manière homogène donnera une impression de gaieté, alors qu’une scène sombre avec de forts contrastes donnera une aura plus triste et l’accentuation des ombres insistera sur le tragique.

On voit cela avec les techniques picturales comme le clair-obscur, qui permet d’ajouter du dramatique à une scène. On peut évoquer la composition des peintures de Le Caravage, qui crée des arrière-plans sombres, qui est souvent définie comme une mise en scène, empruntant des codes au théâtre.

Elle transmet l’émotion

L’éclairage va aider à écrire l’histoire et à transmettre une émotion. Dans des films d’horreur, par exemple, les pièces sombres ayant de faibles zones de lumière permettent d’instaurer un suspense visuel. Même si rien ne se passe, le spectateur est en attente d’une action soudaine, et est plongé dans l’incertitude et l’angoisse du personnage.

Enfin, la lumière va permettre de mettre en valeur le personnage et son caractère à un instant-T. Un héros ne sera pas éclairé comme un malfaiteur, et selon son évolution, un personnage sera éclairé différemment, en fonction de l’aura qu’il émane.

Les différents types d’éclairages en audiovisuel

Pour arriver à retranscrire ces propriétés, plusieurs types d’éclairages sont utilisés dans le milieu audiovisuel, comme l’énonce si bien John Alton :

  • La keylight, ou lumière principale, utilisée pour éclairer l’ensemble de la scène ;
  • La frontlight, ou lumière frontale, provient de la direction d’où filme la caméra ;
  • La crosslight provient d’un côté, et traverse le champ ;
  • La toplight provient d’en haut ;
  • La backlight provient de l’arrière du sujet, d’en haut ou du sol ;
  • La cross backlight, ou kicker, provient de l’arrière-plan, et peut être placée en hauteur ou au sol ;
  • L’eyelight permet d’éclairer les yeux des personnages, leur conférant souvent un léger reflet ;
  • La fill, ou filler light, est une lumière douce, ne créant pas d’ombres, qu’on utilise quand la keylight est trop forte, créant de fortes ombres ;
  • La clotheslight est utilisée pour éclairer les vêtements sombres.

Dans son livre, Alton nous permet de comprendre l’effet qu’ont ces lumières en utilisant une sphère, qu’on peut voir ici. Si elle est photographiée avec uniquement une frontlight, celle-ci apparaîtra comme étant plate. Si, au contraire, on  change la frontlight en keylight, tout en lui ajoutant un filler, un kicker et une backlight, la sphère retrouve sa profondeur : c’est la règle de l’éclairage trois points.

Sur ces photographies, on peut faire le parallèle avec le motion design, dont le principe est d’animer des formes simples en 2D. Dans cette discipline, l’éclairage est donc d’autant plus primordial qu’une forme peut être utilisée pour représenter une multitude d’objets différents. C’est donc dans les détails que l’on va pouvoir les différencier. Sans avoir un rendu trop réaliste, les ombres permettent de faciliter la compréhension de manière efficace.

Focus : animation & motion design

Derrière chaque film et film d’animation, il y a une personne ou une équipe chargée de la lumière et du style graphique de l’œuvre. Les différentes techniques qu’ils mettent en œuvre permettent de sublimer le storytelling de l’ensemble. Bien sûr, cela est davantage complexe à mettre en œuvre, puisqu’en animation, cela nécessite un travail précis et une gestion supplémentaire de calques à animer, en plus des connaissances nécessaires à la cohérence de la lumière. Il faut aussi que ce travail soit assez subtil pour paraître naturel, et que l’ambiance proposée aux spectateurs soit induite.

Mais elle peut aussi être utilisée de manière originale et permettre d’affirmer un certain style. Comme en peinture, où les artistes modèlent la lumière pour créer leurs scènes, et en art moderne et contemporain où des installations permettent de créer des œuvres immersives (comme celles de James Turrell), l’animation est un domaine de liberté qui nous permet de créer l’ambiance de notre choix, et de jouer sans limites, si ce n’est celles du plausible, avec les changements de couleurs, de lumières, et la mise en avant des ombres.


Sources